Frédéric Clot

« Frédéric Clot n'utilise pas les modes de productions actuels des images pour produire ses propres images puisqu'il dessine et qu'il peint. Il s'en empare au début du processus. Ses dessins et sa peinture rappellent toujours quelque chose qui est emprunté aux images et à la communication de masse - on s'en souvient mais ce n'est pas tout à fait ça, on s'en souvient car ce n'est pas tout à fait ça. Son matériel n'est pas la «réalité», comme le prétendent ceux qui opèrent dans le champ de l'information et de la communication, ce sont les images elles-mêmes c'est-à-dire un monde déjà modifié. Ce qui le singularise c'est le processus qui conduit des images aux images. »...
« La gestuelle de Frédéric Clot remonte à plusieurs siècles. On la trouve déjà chez Paolo Véronèse, chez Pierre Paul Rubens ou chez Franz Hals qui parviennent à composer des images reconnaissables en substituant la vitesse d'exécution à la précision du détail statique (ainsi, Hals donne-t-il l'illusion de l'architecture compliquée des collerettes de ses personnages en quelques traits croisés de pinceau alors que ses prédécesseurs s'engageaient dans de minutieuses constructions miniaturistes). Quant à la manière dont Frédéric Clot applique ses couleurs et les répartit sur la toile, avec des chevauchements de surfaces, des coulures et des accidents, elle a des antécédents dès le XIXe siècle, notamment dans la peinture de plein air. »…
… « Frédéric Clot montre que le visible est une source de jouissance et une menace. Sa peinture rappelle la douce frayeur devant les monstres des livres illustrés pour enfant, douce parce que ce sont des livres, parce que ce sont des enfants et que des adultes qui vivent dans le monde «réel» sont là pour témoigner que ce ne sont que des livres et des illustrations. Mais nous ne sommes pas des enfants, il n'y a pas de parents pour nous rassurer, les images inquiétantes nous entourent. Le grand méchant vu n'est pas une légende. La preuve? Frédéric Clot l'a peint. »…

Laurent Wolf, extrait du préface du catalogue: Frédéric Clot, Prédation, dessins peintures 2007-2010, 2011

« ... Je ne sais pas comment Frédéric Clot parvient à ses images. Ou plutôt, je peux m'imaginer. Un apprentissage du métier et du regard sans garde-fou, sans œillères et pourtant sans débordement de style et encore moins de bavardage. Un travaille qui joue de l'oscillation permanente; pas de contraintes: ni conceptuelles no programmatiques et encore moins méthodologique. Je le répète, tout est affaire d'oscillation de retour à soi après la perte, de la main gauche à la main droite, du voyage à l'atelier. Lorsqu’il traverse des contrées nouvelles, Frédéric Clot les défriche à coups des dessins, nombreux, afin de capturer des nouveaux langages dont la syntaxe se développera dans l'atelier. Il fait ses gammes se laissant basculer et envahir par des réalités diverses. .... Des lignes de force tiennent en joue ces forêts où la perspective s'arrête là ou commence la ville imperceptible. Quant aux villes, elles s'inscrivent dans des échelles improbables, pures expressions de mégapoles préhistoriques, bien avant, bien après le règne humain… »

Extrait du texte "Frédéric Clot, peintures, dessins" Cat.1 Florence Grivel, 2005